Fr : version française / En: english version
Bizarrement, alors que la rue se police, Jean Dubuffet dépeint une rue anarchique, peuplée de gens qui ne semblent pas maîtriser leurs déplacements.
C'est que la rue n'est pas qu'une voie de passage, c'est un organisme vivant avec son rythme, ses lois et leurs détournements.
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?
Ailleurs, bien loin d'ici ! Trop tard ! Jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !
Charles Baudelaire, Les fleurs du mal.
Les piétons sont tour à tour badauds, clients, promeneurs... Dans La rue passagère, l'ambiguïté du titre révèle la polyvalence de la rue.